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2025 Frédéric Chanclu © — Paris


SÉRIE III


Portrait(s) de l’architecte



  
     Cette série est née de l’intimité d’un quotidien partagé, où l’autre se laisse voir dans les moments les plus banals de sa vie. Peindre ces scènes — démarrer la journée par la luminothérapie, clope au bec en buvant son café ; passer la nuit derrière son écran à travailler ; faire une sieste le week-end après avoir terminé la vaisselle — prit tout son sens, quand l’élan de représenter des ailleurs fantasmés s’était tari en moi, remplacé par la nécessité de capturer ces fragments de vie suspendus. Ces images semblaient figées dans une langueur qui me renvoyait à ma propre sédentarité, parfois pesante, d’autant plus qu’elle s’accompagne de la solitude — devenue la problématique centrale de ma vie. 

    This series was born from the intimacy of a shared daily life, where the other person allows themselves to be seen in the most mundane moments. Painting these scenes—starting the day with light therapy, cigarette in mouth while drinking coffee; spending the night working behind a screen; taking a nap on the weekend after finishing the dishes—took on its full meaning when my urge to depict fantasized elsewhere had dried up, replaced by the need to capture these suspended fragments of life. These images seemed frozen in a certain languor, reflecting my own sedentary life—sometimes burdensome, especially as it comes with solitude, which has become the central issue of my existence.






L’Architecte, 2020
Peinture à l’huile sur toile
24 x 16 cm

Exposition collective L’ami.e modèle,
octobre/décembre 2022 au Mucem,
Commissaire : Mathieu Mercier,
invité par la Fondation Pernod Ricard


Dimanche soir, Ivry-sur-Seine,
Peinture à l’huile sur toile
81 x 60 cm

Dimanche après-midi, Rive gauche, 2022
Peinture à l’huile sur toile
50 x 50 cm

Les matins, Rive gauche, 2023
Peinture à l’huile sur toile
61 x 38cm

Grindr,
Peintures à l’huile sur toile
7 x 5 cm




    Quand il y a dans le frigo assez pour tenir presque une semaine sans sortir, et que les prochains jours s’annoncent engloutis par un travail vide de sens, mon appartement devient alors le centre du monde. La vie se met en pause. Je fume trop, je mange mal, je me masturbe deux trois fois par jour, je dors un peu. Et surtout je travaille. Ces journées passées comme en apnée derrière cet écran d’ordinateur se prolongent souvent jusqu’à tard dans la nuit, laissant derrière elles un sentiment de temps perdu. Je délaisse la peinture et mes amis. Au fil des années, l’idée que je me faisais du bonheur s’efface petit à petit. Dans ces moments, je me souviens de l’époque où je voyais la vie comme un vaste territoire à conquérir ; quand les chansons, les films et les livres étaient le modèle à suivre. Je me demande comment retrouver mon souffle, si l’amour ou l’argent m’extirperait de cette inertie. Tout un tas de questions. Puis finalement, je me dis que tant que j’arrive à payer mon loyer, mes factures et quelques pintes en terrasse, tout va bien, que je peux m’estimer heureux.

    When the fridge is stocked enough to last nearly a week without going out, and the coming days are set to be swallowed up by meaningless work, my apartment becomes the center of the world. Life is put on hold. I smoke too much, eat poorly, masturbate two or three times a day, sleep a little. And above all, I work. These days spent in a state of apnea behind a computer screen often stretch late into the night, leaving behind a sense of wasted time. I neglect painting and my friends. Over the years, the idea I once had of happiness slowly fades away. In those moments, I remember the time when I saw life as a vast territory to conquer, when songs, movies, and books were the models to follow. I wonder how to find my breath again, whether love or money could pull me out of this inertia. So many questions. And then, in the end, I tell myself that as long as I can pay my rent, my bills, and afford a few pints on a terrace, everything is fine—that I should consider myself lucky.